Où sont passés les géants européens de la tech ?

Salut les investisseurs malins, j’espère que tu vas bien. Je m’appelle Gabriel Jarrosson et je suis français. Je me souviens quand j’étais petit, avoir entendu parler de géants de la technologie européens. Nous avions dans les smartphones un constructeur français, qui s’appelle Alcatel. Il y avait bien sûr les Nokia qui venaient de Finlande, les téléphones Siemens, qui sont allemands, et les téléphones Ericsson, qui étaient suédois. Beaucoup de personnes possédaient un téléviseur Philips, qui était hollandais, et plein d’autres marques européennes. Mais aujourd’hui nous sommes en 2019. et la plupart de ces sociétés ont disparu. Alors où sont les géants européens de la tech ?

Avant de faire cette vidéo, je me suis demandé si c’était simplement mon imagination, ou s’il y avait vraiment un déficit de géants tech européens, alors j’ai commencé à faire mes recherches. Pour simplifier mes recherches, je me suis limité aux produits de grande consommation, les produits auxquels toi et moi on pouvait être confrontés dans notre quotidien, en tant que consommateur. Par exemple, j’ai inclus les smartphones et les moteurs de recherche, qu’on utilise toi et moi tous les jours, et j’ai exclu les outils d’automatisation industrielle ou les logiciels de comptabilité, pour les entreprises. Je vais te présenter ce que j’ai trouvé et c’est assez intéressant. Bien sûr, avant de commencer, si ce n’est pas déjà fait, je t’invite à cliquer sur le bouton « S’abonner » juste en dessous de cette vidéo, pour t’abonner à la chaîne You Tube Leonis, ne rater aucune de mes vidéos, et rejoindre plusieurs milliers d’investisseurs malins. C’est parti.

Côté hardware, l’Europe est inexistante, il n’existe aucune société européenne de grande envergure, fabriquant des ordinateurs des consoles de jeux, ou des smartphones. Il existe bien HMD ou Wileyfox et Wiko, mais ces entreprises sont relativement minuscules, ces trois marques réunies, vendent moins de smartphones qu’une marque chinoise. Depuis que Philips a vendu son business de télévision, l’Europe n’a aucune marque de télé ni d’écran. L’audio et le son, se portent un peu mieux avec quelques marques européennes d’envergure mondiale, comme Sennheiser allemand. Mais le secteur est en déclin, et certaines marques se vendent à des étrangers, comme par exemple la marque autrichienne AKG. L’industrie de l’appareil photo, reste dominée par les Japonais et les Américains. Pour les objets hardware plus récents, comme les smartwatches, la réalité virtuelle ou les drones, l’Europe n’est même pas dans la course. Même au niveau des composants informatiques, l’Europe ne compte quasiment aucune société. Malgré quelques rares success stories européennes, on peut dire qu’au niveau hardware, l’Europe est très, très loin, derrière les États-Unis et l’Asie.

La situation est un peu meilleure au niveau du software, mais il y a aussi un problème. Je vais diviser cette catégorie en trois parties, infrastructures, plateformes, et applications grand public. L’infrastructure est l’épine dorsale d’Internet. Cela inclut le cloud, les serveurs, les noms de domaine, etc. Il n’y a aucune société européenne, dans ces catégories d’envergure mondiale. Des sociétés d’hébergement Web, existent un peu partout pour la proximité géographique et le français OVH, s’en sort très bien au niveau européen. Mais les sociétés américaines dominent largement au niveau mondial, avec les vrais concurrents sérieux, plutôt en Chine qu’en Europe. Les plateformes sont du software, sur lequel d’autres applications peuvent être utilisées. Cela inclut les systèmes d’exploitation, les navigateurs Web, les AppStore, les moteurs de recherche et même les réseaux sociaux. Si tu veux construire une app, tu dois la rendre accessible au travers de ces plateformes.

Une fois de plus, les sociétés américaines dominent largement le marché. Il n’y a pas une seule société européenne majeure, dans la moindre de ces catégories, et une fois de plus, les rares concurrents potentiels, sont chinois. Dans les applications grand public, les sociétés européennes ont réussi à créer avec succès, des produits de portée mondiale. Voici quelques exemples. C’est super, mais là aussi il y a un léger problème, c’est le passage à l’échelle. Toutes ces success stories, viennent de sociétés, ayant conçu un produit unique, ou très peu de produits. Ce sont des spécialistes. Pendant ce temps, aux Etats-Unis et en Chine, en plus de ces spécialistes, il y a aussi 5 d’un côté et 3 de l’autre, sociétés, qui sont des géants de la tech multi produits et multi secteurs. Ces sociétés font des milliers de choses en même temps, et rachètent des centaines de startups chaque année. L’Europe n’a aucune société comme ça. Nous avons beaucoup de petits poissons, mais aucun gros poisson, aucun géant.

En résumé, l’Europe est larguée sur l’infrastructure et les plateformes, au niveau software. Et malgré certains succès dans les applications grand public, nous manquons de géants de la tech. On peut dire que le déficit tech en Europe, est réel. Mais alors pourquoi ce déficit ? Pourquoi les Européens ne créent-t-ils pas plus de sociétés tech, à grande échelle ? Cette décomposition est un élément de réponse. La catégorie applications grand public, est la seule dans laquelle l’Europe a un petit peu de succès.

Ce qui différencie cette catégorie des autres, est qu’il y a de la place pour des dizaines de milliers de sociétés. Plus il y a d’applis, mieux tout le monde se porte. N’importe qui, avec une bonne idée, peut créer son application depuis sa chambre, qu’il soit en Europe, aux Etats-Unis, en Asie, ou n’importe où. Pour les plateformes et les infrastructures, il y a moins de place. C’est un marché beaucoup plus winner takes all, où les consommateurs n’utilisent en définitive, que quelques systèmes d’exploitation, que quelques navigateurs Web, que quelques moteurs de recherche, etc.. Lorsque vous avez plusieurs dizaines de milliers d’employés, le jeu n’est pas du tout le même, et une bonne idée ne suffit plus, il vous faut un bon environnement macroéconomique, beaucoup d’investisseurs, prêts à injecter énormément d’argent dans votre société, des taxes pas trop élevées, et un vivier illimité de talents, formés à très haut niveau, pour pouvoir recruter. Et c’est finalement le centre du problème.

L’Europe est en retard, sur pratiquement tous ces points. Nous avons beaucoup de talents et beaucoup d’entrepreneurs, avec des super idées, prêt à construire des supers startups, comme le montre la catégorie « applications », mais ce n’est pas suffisant pour atteindre la taille d’un Google. Alors pourquoi ? Eh bien j’ai isolé cinq raisons, qui font que l’Europe n’est pas assez compétitive.

Il y a la réglementation, le climat d’investissement, la géographie et la démographie, l’attitude des citoyens européens envers la technologie, et l’absence d’écosystème startup.

Commençons par la réglementation. Même si de nombreux efforts sont faits en ce sens, la réglementation européenne comparée à celle des Etats-Unis, ou de la Chine, n’est pas idéale pour une startup. Les impôts sont relativement élevés, ce qui en soi, est un désavantage. Les lois encadrant le travail, sont extrêmement strictes, et protègent les salariés au détriment de la souplesse pour les startups, et découragent beaucoup de patrons d’embaucher, à défaut de pouvoir licencier les salariés par la suite, facilement.

C’est particulièrement embêtant pour une société tech, où les fluctuations d’activités sont importantes, et qui doivent s’adapter en permanence, à un environnement changeant. Les lois sur la vie privée, sont également parmi les plus strictes au monde. Des sociétés comme Google, ou Facebook, dont le business model est d’exploiter la data de leurs utilisateurs, sont en permanence en guerre avec les autorités européennes, encore aujourd’hui.

Enfin les lois de protection du consommateur, sont nombreuses, ce qui demande aux sociétés de dépenser beaucoup de temps et d’argent pour la conformité, au lieu d’utiliser cet argent pour innover.

Le climat d’investissement en Europe, est également moins avancé qu’aux Etats-Unis ou en Chine. C’est plus dur pour les startups européennes, de lever de l’argent, surtout lorsqu’elles grossissent. Le magazine Fortune a d’ailleurs étudié ce sujet en 2015, et comme tu le vois sur cet article, les IPO européennes, eh bien les sociétés sont valorisées 2,6 fois leurs revenus, alors que les sociétés américaines sont-elles valorisées 3,9 fois leurs revenus. Les sociétés européennes ont plus de mal à lever de l’argent.

Et puis, il y a bien sûr la géographie. Lancer un produit global est tout simplement plus facile dans les marchés vastes et homogènes, comme les Etats-Unis ou la Chine, où une application peut très rapidement atteindre beaucoup, beaucoup, de monde et passer à l’échelle. Pour faire pareil en Europe, il faut adapter le produit à plus de 30 langues, 30 cultures et surtout 30 systèmes légaux, et judiciaires différents.

Imagine un outil comme Alexa, lancé en Europe en premier. Il y a également quelque chose d’un peu plus subtil. Je suis ici obligé de généraliser et ce n’est évidemment pas le cas de tout le monde, mais les Européens ont tendance à être assez pessimistes, au sujet de la technologie et du business. C’est la raison pour laquelle les lois d’encadrement du travail, et de protection des salariés, et de la vie privée, sont aussi strictes.

Quand j’habitais en Chine, j’étais constamment surpris par la façon dont les locaux fondamentalement sont optimistes et positifs à propos de la technologie, qui permet selon eux de résoudre leurs problèmes. En Europe, beaucoup de personnes trouvent que ces mêmes sociétés tech, sont plutôt la cause de nos problèmes, et pas la solution. Cette attitude rend l’adoption des nouvelles technologies, beaucoup plus lente en Europe, qu’ailleurs. Il suffit de voir les usages dans le monde, concernant le paiement en magasin, et le retard que l’Europe a accumulé à ce sujet.

La dernière raison est le manque d’un écosystème fort de startup. Un écosystème riche en innovation et en créativité comme la Silicon Valley aux Etats-Unis, ou Shenzhen en Chine, créent un cercle vertueux, qui amène à son tour, plus d’innovation et plus de startups. L’Europe, étant très décentralisée, nous n’avons pas de hub au niveau européen, de la taille de la Silicon Valley, même si bien sûr il y a des petits hubs, au niveau des pays. C’est le problème de la poule et de l’œuf, plus de tech dans les écosystèmes créent toujours plus de tech aux Etats-Unis et en Chine, et moins de tech en Europe, crée moins de tech.

Je pense que ces cinq raisons combinées, expliquent pourquoi nous n’avons pas de géants de la tech en Europe. C’est tout simplement plus difficile de les financer, plus difficile d’embaucher et de licencier des talents, et plus difficile de passer à une large échelle des populations. C’est pour ça que nous pouvons créer des spécialistes, mais pas des géants de la tech. Au-delà de tout ça, le manque de géants de la tech européens, a un effet secondaire très important. Les nouveautés développées par les spécialistes, finissent souvent par être rachetées par les géants.

Ça s’appelle un exit, et la plupart des fondateurs, des entrepreneurs, et des investisseurs, adorent ça, car cela leur permet de gagner de l’argent, beaucoup d’argent. Le problème c’est que, comme l’Europe n’a aucun géant, la plupart des exits européens, se font vers des géants non européens. Les exits de l’Europe, constituent une fuite des cerveaux.

Ceci pourrait être ma conclusion, les startups tech européennes, ont du mal à grossir, et quand elles y arrivent, elles se font racheter par des géants étrangers. Alors je sais que tout ça peut paraître déprimant mais rassure toi il y a aussi une autre façon de voir les choses. Ce qui n’est pas bon pour les startups, peut être bon pour nous les Européens. Et de fait, il y a beaucoup de bénéfices au fait, d’être Européens. En général les Européens ont plus de vacances, les Français sont évidemment champions du monde de toutes catégories, avec nos 5 semaines, alors qu’aux Etats-Unis c’est deux semaines par an, et en Chine une semaine par an. L’Europe est également un continent où il y a beaucoup moins d’inégalités, il y a le chômage en France, et des aides aux « sans emploi ».Dans les autres pays ça n’existe pas, bien sûr en Chine et les Etats-Unis. Nous avons également la sécurité sociale, et l’accès aux soins gratuite, une éducation de très bonne qualité et à nouveau gratuite, et je pense à nouveau bien sûr aux Etats-Unis, où ils ont des très, très gros problèmes d’éducation. Nous avons également des très bons transports publics, une meilleure protection de la vie privée, et nous protégeons beaucoup mieux l’environnement, et bien sûr je me tourne notamment vers la Chine, qui est un très gros pollueur, même si ils font beaucoup d’efforts pour que ça change.

Je te laisse juger, si cela vaut la peine ou pas d’avoir des géants de la tech en Europe. Dans tous les cas, voici le compromis que nous avons choisi de faire.

Voilà, c’est terminé pour cette vidéo. Maintenant j’aimerais avoir ton avis, pourquoi à ton avis, l’Europe n’a plus de géants de la tech, est-ce que j’ai oublié des éléments, est-ce qu’il y a des éléments à rajouter ? N’hésite pas à donner ton avis en commentaires, je suis absolument ravi de discuter de ça avec toi. Si cette vidéo t’a plus et je te remercie de l’avoir regardé jusqu’au bout, eh bien je t’invite à l’aimer, à la partager à quelqu’un que ça peut intéresser. Et évidemment, si tu n’es pas abonné à la chaîne You Tube Leonis, c’est je pense le moment de le faire. Moi je te dis à très bientôt pour une prochaine vidéo.